Un taux de disparition annuel des espèces mille fois supérieur actuellement qu'avant la révolution industriel, 30% d'entre elles pourraient avoir disparu en 2050. Par ces chiffres Hubert Reeves sonne l'alarme dès le début de son livre. Il poursuit en montrant que le réchauffement climatique de presque 1°C depuis le début du XX ème siècle n'est maintenant plus contestable, et cette évolution s'accélère depuis 1990. On peut déjà en voir les conséquences sur l'épaisseur de la banquise, sur le cycle des saisons, et en terme de fréquence des événements climatiques exceptionnels : quintuplement des inondations et cyclones entre 1950 et aujourd'hui. Cette hausse de température est bien due aux rejets de CO2 dont la teneur dans l'atmosphère a augmenté d'un quart depuis le début du XXème siècle. Si cette évolution continue l'augmentation de température pourrait atteindre 5°C d'ici à 2100, alors que depuis le dernier million d'années la température moyenne du globe ne s'était guère élevée au dessus de 14°C sa valeur présente. Même si l'augmentation n'était que de 1 ou 2 degrés cela aurait immanquablement des conséquences sur la biosphère et sur l'homme. Pour stabiliser le taux de C02, il faudrait diviser par deux nos rejets de C02.

Deuxième alerte : la crise de l'énergie qui se prépare. On estime que le pétrole, l'uranium-235 (qui alimente les centrales nucléaires actuelles) et le gaz naturel seront épuisés largement avant la fin du siècle, le charbon dans deux ou trois siècle. L'énergie actuellement consommée dans le monde est l'équivalent de la production de 12 000 réacteurs nucléaires moyens d'une puissance d'1 GW ! Actuellement cette énergie est fourni à 74% par les énergies fossiles, 6% par le nucléaire et 20% par les énergies renouvelables (hydraulique, biomasse, solaire, éolien). La technologie nucléaire à neutron rapide (comme dans le surgénérateur de Creys-Malville) si elle était vraiment maîtrisée nous offrirait pour quelques milliers d'années d'énergie. Pour le plus long terme, il y a l'énergie solaire (y compris ses formes dérivés l'éolien, et l'hydraulique), l'énergie nucléaire de fusion de l'hydrogène en hélium et l'énergie thermique. Hubert Reeves après avoir été pour l'énergie nucléaire est maintenant contre. Elle exige trop des hommes au niveau sécurité, et fait reposer sur les générations futures le problème de la garde des déchets radioactifs. La génération de la fusion nucléaire nécessite actuellement bien plus d'énergie qu'on en retire. En ce qui concerne les énergie renouvelables, en prenant comme hypothèse un doublement de la consommation d'énergie en 2050, il faudrait 60 millions d'éoliennes pour la planète, 500 000 pour la France.

Le troisième chapitre : "Qu'est-ce qu'on va manger ce soir ?" s'interroge sur l'alimentation des 8 à 10 milliards d'humains que devraient compter la planète à l'horizon 2050 (aujourd'hui 6 milliards). La faim dans le monde a régressé au cours des 50 dernières années grâce à l'augmentation des rendements agricoles et de la pêche. Même si 1 personne sur 6 est encore mal nourrie. Mais cette tendance à l'amélioration va t-elle se maintenir ? Les terres arables perdent chaque année une superficie équivalente à la Belgique et au Pays-Bas réunis à cause de l'urbanisation et de la désertification. En 1980 le tiers des continents était désertique, on prévoit qu'en 2010 ce sera 40% et peut-être 50% en 2050. De plus les bouleversements climatiques pourraient noyer de grandes zones de culture du riz. Les engrais azotés qui permettent les rendement actuels ont l'inconvénient de rendre les sols plus fragiles à l'érosion. Une grande partie de l'engrais déversé se perd et devient une nuisance. Les pesticides posent quand à eux des problèmes de toxicité pour l'homme alors que les populations d'insectes s'y adaptent. La pèche stagne depuis 1990. Elle a atteint dans bien des zones son maximum d'exploitation et se voit confronter à l'effondrement du stock de certaines espèces (exemple : la morue en mer du Nord). En ce qui concerne l'eau douce, 21 pays sont en situation de pénurie et on prévoit une aggravation. La consommation d'eau a été multipliée par 7 au XX ème siècle alors que la population a seulement triplée. L'agriculture en consomme 70%, qu'elle gaspille souvent et est responsable de sa pollution par les nitrates (exemple de la Bretagne). La mer d'Aral a été victime du détournement catastrophique de ses affluents à des fins d'irrigations. Le niveau de certaines nappes phréatiques chutent dangereusement du fait d'une exploitation excessive.Cependant des solutions pour augmenter la production agricole sans polluer plus existent (exemple en Indonésie) et on peut encore être optimiste. Hubert Reeves est plutôt réticent vis à vis des OGM, surtout à cause de leur impact économique et il souligne que leur inocuité n'est pas encore certaine.

Ensuite, H.R. s'intéresse aux pollutions accumulées tout au long du XX ème siècle. Sont évoqués dans le domaine militaire : les mines, les stocks d'armes chimiques, les armes biologiques qui sont beaucoup plus dangereuses, et enfin les armes nucléaires qui sont en net réduction mais qui ont laissé des sites extrêmement chers à décontaminer. Du coté des pollutions civiles, on cite les polluants chimiques comme les pesticides ou le PCB, qui affecterait les défenses immunitaires et les organes sexuels de mammifères marins. Ces pollutions expliqueraient aussi chez l'homme l'augmentation des cancers notamment du sein ou la perte de la production de spermatozoïde chez l'homme. L'air des habitations est aussi pollué notamment par le formaldéhyde. L'inaltérabilité des plastiques est une autre source de préoccupation, leur combustion dégage des substances chlorées qui évoluent en dioxine. Enfin se pose le problème de la gestion des déchets ménagers, industriels ou agricoles. Tandis qu'on trouve en orbite 10 000 débris issue de la conquête spatiale !

Le chapitre intitulé "Les animaux nos frères" traite naturellement de la disparition des espèces. (Hubert Reeves est président de la ligue ROC de préservation de la faune sauvage et de la défense des non-chasseurs)
D'après le principe d'Olaf Arrhenieux on estime que lorsque 50% d'un territoire est détruit, 90% des espèces endémiques ont été exterminés.
Sont en danger par exemple le bonobo, la baleine bleu, l'éléphant.
On disparu dans les dernières décennies le bouquetin des pyrénées et probablement le phoque moine.

Un être humain sur dix est sous alimenté, un sur trois vis en dessous du seuil de pauvreté : 2$ par jour.
Certaines population sont aujourd'hui contrainte de s'exiler à cause des problèmes liés à l'activité humaine : 25 millions de personnes selon le PNUE seraient réfugiée pour cause écologique. Le réchauffement qui entraînera une monté des eaux menace de nombreux deltas surpeuplés comme au Bengladesh.
A l'inverse la pauvreté, les déplacements de population provoque une pression sur l'environnement.Cependant c'est tout de même les pays les plus industrialisés qui produisent le plus de gaz à effet de serre.
L'espérance de vie est passé de 30 à 67ans aux cours du XX ème siècle. Mais il y a une grande disparité entre pays du Nord et ceux du Sud. En Afrique l'espérance de vie, à cause du Sida a même récemment diminué jusqu'à 45 ans. L'écart des revenus entre les 10% les plus riches et les 10% les plus pauvre s'est nettement agravé depuis 50ans. Cet écart pourrait en suscitant le désespoir encourager le terrorisme. L'occident n'est pas étranger à cette misère. Par exemple en subventionnant des exportations agricoles, on décourage les producteurs locaux. Une part du revenu des pays pauvres part au remboursement des intérêts de leur dette tandis que l'aide au développement reste faible.

Dans le dernier chapitre, H.R. fait le constat qu'il y a eu une prise de conscience écologiste depuis une dizaine d'année. Cependant, les gouvernements des démocraties ont peur de perdre les élections si ils prenaient les mesures nécessaires. Des actions ont tout de même été faites : le pot catalytiques, l'interdiction des CFC. Certaines villes adoptent des mesures écologiques. Des actions sont également prises pour empêcher la disparition d'espèces menacées. Les intérêts écologiques rejoignent en fait souvent ceux de l'économie. On peut citer aussi l'écotourisme. H.R. appelle de ses voeux "un anti manhattan" écologique : mettre autant de moyen pour lutter contre le réchauffement climatique qu'on en a mis pour créer la bombe atomique. Il faudrait développer toute les formes d'énergie renouvelables et économiser l'énergie par diminution du trafic routier. Réformer l'agriculture, lutter contre la pauvreté. A l'échelle individuelle, chacun peut faire des gestes et manifester son soutien à cette cause en adhérant à des association de défense de l'environnement.


"Mal de Terre" (260 pages) est paru en 2003 aux éditions Seuil dans la collection Science ouverte.